• Peintre, sculpteur, dessinateur, céramiste, lithographe
  • 1881 – 1973
  • Espagnol – Français

Pablo Picasso

Pablo Ruiz Picasso, né à Malaga (Espagne) le 25 octobre 1881 et mort le 8 avril 1973 à Mougins (Alpes-Maritimes, France), est un peintre, dessinateur, sculpteur et graveur espagnol ayant passé l’essentiel de sa vie en France.

Artiste utilisant tous les supports pour son travail, il est considéré comme le fondateur du cubisme avec Georges Braque et un compagnon d’art du surréalisme. Il est l’un des plus importants artistes du xxe siècle, tant par ses apports techniques et formels que par ses prises de positions politiques. Il a produit près de 50 000 œuvres dont 1 885 tableaux, 1 228 sculptures, 2 880 céramiques, 7 089 dessins, 342 tapisseries, 150 carnets de croquis et 30 000 estampes (gravures, lithographies, etc.). Parmi ses œuvres les plus célèbres figurent le proto-cubiste Les Demoiselles d’Avignon (1907) et Guernica (1937), une représentation dramatique du bombardement de Guernica pendant la guerre civile espagnole.

Enfance et famille

Pablo Picasso naît le 25 octobre 1881 au 36, place de la Merced (aujourd’hui no 15), à Malaga. Il est le premier enfant de José Ruiz y Blasco, alors professeur de peinture à l’école provinciale des Arts et métiers de la ville dite « San Telmo », et de María Picasso López, une fille de vignerons.

Son nom complet est Pablo Diego José Francisco de Paula Juan Nepomuceno María de los Remedios Cipriano de la Santísima Trinidad Mártir Patricio Ruiz y Picasso.

Le nom de Picasso, qui n’est pas espagnol, serait selon certains auteurs d’origine italienne. Un de ses arrière-grands-pères est né à Sori dans la région de Gênes. En revanche, selon Robert Maillard, la famille ne serait pas originaire d’Italie. Pablo avait deux sœurs (Maria de los Dolores, dite « Lola », née en 1884, et Maria de la Concepción, dite « Conchita », née en 1887), mais aucun frère.

En 1891, le musée provincial de Malaga dont José Ruiz Blasco était le conservateur, ferme ses portes, ce qui oblige le père à trouver d’autres moyens de subsistance. La famille déménage à La Corogne et José Ruiz Blasco occupe un poste de professeur au lycée Da Guarda. La mort de sa sœur Conchita, d’une diphtérie en janvier 1895, traumatise Picasso. Son vœu d’arrêter la peinture si sa sœur avait guéri n’étant pas exaucé, il se réfugie dans son art. Son père est alors nommé professeur à La Llotja de Barcelone, en 1895.

Une collection Mellon conservait en 1966 le portrait par Picasso d’une de ses sœurs daté de 1901.

Le peintre débutant

Picasso, encouragé par son père qui lui accorde toute confiance, peint ses tout premiers tableaux à l’âge de huit ans, son préféré étant Le Petit Picador jaune (1889), sa première peinture à l’huile, dont il refusera toujours de se séparer. Pendant l’été 1895, Pablo découvre Madrid et Barcelone, passe ses vacances à Malaga et revient par la mer à Barcelone. À cette occasion, il réalise des marines du voyage.

C’est durant l’hiver 1895 qu’il peint sa première grande toile académique : La Première Communion. L’année suivante, il entre à l’école des Beaux-Arts de Barcelone. Il signe ses premières œuvres Ruiz-Picasso avant d’opter pour P.R.-Picasso puis définitivement pour Picasso en 1901, à cause de l’étrangeté du nom et du digraphe ss inusité en espagnol.

À Barcelone en 1896, il est reçu à l’École de la Llotja, où enseigne son père, ayant exécuté en un jour le sujet de l’examen pour lequel on laisse généralement un mois aux candidats. C’est en 1896 qu’il peint L’Enfant de chœur. Don José lui loue alors un atelier, rue de la Plata, qu’il partage avec son ami peintre Manuel Pallarès, et où il peint Science et charité (1896), l’une de ses plus importantes toiles d’enfance. Pour cette œuvre, son père a imaginé la composition qui représente une malade couchée sur un grabat, assistée d’un médecin (Picasso réalisera le portrait de son père) et d’une religieuse. Ce tableau reçoit à l’exposition des Beaux-Arts de Madrid une mention honorifique. Il est fortement influencé par le modernisme catalan à cette époque. Dès l’âge de quinze ans, Manuel Pallarès l’initie précocement aux bordels du barrio chino de Barcelone. C’est dans ces lieux qu’il réalise de nombreux feuillets, dessins et aquarelles érotiques dont le sujet subversif se retrouvera dans la sensualité de ses dessins ou tableaux ultérieurs.

En septembre 1897, Picasso part étudier à Madrid et réussit en octobre le concours d’entrée à l’académie royale de San Fernando. Cependant l’enseignement de l’institution ne lui plaît pas et il renonce à suivre les cours. En juin 1898, il retourne à Barcelone, puis part pour Horta de Sant Joan, le village de son ami Pallarès, situé près de la ville de Gandesa où il partage la vie des paysans. Plus tard, il dira : « Tout ce que je sais, je l’ai appris dans le village de Pallarès. » En avril 1899, il est de nouveau de retour à Barcelone, où il s’installe au no 1, rue des Escudillers. Picasso fréquente alors le cabaret Els Quatre Gats, phare de la bohème, créé en référence au Chat Noir de Paris. Là, il rencontre notamment Miguel Utrillo, et se lie d’amitié avec le poète Jaime Sabartés, Carlos Casagemas, le peintre Opisso, le sculpteur aragonais Pablo Gargallo et Julio Gonzalez. Une exposition de ses peintures se tient dans le cabaret le 1er février 1900.

Sa toile, Les Derniers Moments, représente l’Espagne à l’Exposition universelle de 1900 à Paris. Il part, avec Casagemas dont il est très proche, pour la capitale française où il s’installe dans l’atelier du peintre Nonell à Montmartre. Picasso s’y imprègne de l’atmosphère du Moulin de la Galette et rencontre le marchand Pedro Mañach, ainsi que Berthe Weill qui lui achète trois scènes de tauromachie, les premières toiles qu’il vend à Paris. Réalisant des œuvres de commande, il vend également quelques pastels à des amateurs. Il rentre à Barcelone le 20 décembre, avec Casagemas que le peintre emmène avec lui jusqu’à Malaga pour le sortir de sa mélancolie. À la mi-janvier 1901, Picasso part pour Madrid. Le 17 février, Casagemas, après avoir tenté de tuer son amante Germaine, qui était une danseuse volage du Moulin rouge, se suicide à Paris. Picasso, bouleversé par la mort de son ami, peindra un tableau clé, La Mort de Casagemas, dont il dira qu’il a conditionné grandement son passage à la période bleue, empreinte de douleur, de tristesse et faisant référence aux grands maîtres espagnols. En avril 1901, il retourne à Barcelone puis, en mai, il repart à Paris et s’installe au 130 ter boulevard de Clichy, chez Pedro Mañach qui le loge pendant quelques mois dans son appartement personnel et lui offre un salaire. Il livre quelques dessins à des périodiques humoristiques parisiens qu’il signe sous le nom de « Ruiz ».

Période bleue (1901-1904)

La période bleue correspond aux années 1901-1904 : ce nom vient du fait que le bleu est la teinte dominante de ses tableaux de cette époque, qui a débuté avec le suicide de son ami catalan Carlos Casagemas, ce qui explique qu’elle soit marquée par les thèmes mélancoliques de la mort, de la vieillesse, et de la pauvreté, mais ne l’empêche pas d’être satirique. Durant ces années, Picasso peint des pauvres, des mendiants, et des aveugles, sous forme de personnages souvent étirés et faméliques inspirés des tableaux du Greco que Picasso étudie à cette époque et qui l’influencent fortement. Le premier tableau de cette période fut La Mort de Casagemas, et les œuvres importantes sont : Dama en Éden Concert (1903), La Vida(1903), Las Dos hermanas (1904), La Celestina (1904). Il vit pendant ces années dans le dénuement. Bien que son père lui envoie des toiles et des tubes de peinture, par souci d’économie, il réalise plusieurs peintures sur le même tableau ou doit brûler une liasse de ses dessins pour se chauffer.

Entre le 25 juin et le 14 juillet 1901, Picasso et Francisco Iturrino font une exposition à la galerie d’Ambroise Vollard, à Paris. Picasso fait la connaissance du poète Max Jacob. Pendant l’hiver, il peint Autoportrait bleu (Paris, Musée Picasso). Fin janvier 1902, il se rend à Barcelone. La galerie Berthe Weill expose du 1er au 15 avril des œuvres de Lemaire et de Picasso. Il revient à Paris en octobre avec Sébastien Junyer. Et il montre pour la première fois ses toiles bleues, du 15 novembre au 15 décembre, dans une exposition de groupe chez Berthe Weill. En janvier 1903, Picasso est de nouveau à Barcelone. Au printemps, il commence la toile La Vie (Cleveland Museum of Fine Arts).

Période rose (1904-1906)

À partir de 1904, il s’installe à Paris, au Bateau-Lavoir, dans l’atelier laissé par Paco Durrio. Là, il rencontre sa première compagne : Fernande Olivier. C’est le début de la période rose. Comme précédemment, c’est l’utilisation des teintes « rougées » qui explique cette dénomination. Les thèmes abordés sont la joie et l’inquiétude existentielle. Il reste mélancolique et dominé par l’amour ; on y trouve aussi de nombreuses références au monde du zoo et du cirque. Il peint des masques, arlequins, dompteurs et clowns. Picasso privilégia pendant cette période le travail sur le trait, le dessin, plutôt que sur la couleur… C’est aussi l’époque des maternités roses.

Picasso fait la connaissance de Guillaume Apollinaire, d’André Salmon et d’Amedeo Modigliani.

Du 25 février au 6 mars 1905, Picasso expose à la galerie Serrurier, ses premières toiles roses. Au printemps, il peint Les Saltimbanques (Washington, National Gallery). Pendant l’été, il fait un séjour à Schoorl en Hollande, et y peint Les Trois Hollandaises (Paris, Musée national d’art moderne, dépôt au Musée Picasso).

En automne 1905, il rencontre Gertrude et Leo Stein. Ces deux mécènes lui achètent de très nombreuses toiles et apportent au peintre désargenté une plus grande aisance financière et une nouvelle stimulation intellectuelle. On commence à trouver dans ses toiles le thème de la mort. Notamment dans son tableau, Arlequin, dont il fait cadeau en 1919 au Museo de Arte Moderna de Barcelone. Le galeriste Ambroise Vollard achète la plupart des toiles roses en mars 1906. En mai, il part avec Fernande Olivier pour Barcelone, puis durant l’été à Gósol, village isolé de Haute-Catalogne. Ce séjour aura un impact majeur dans l’œuvre de Picasso. C’est dans ce petit bourg de la province de Barcelone qu’il conçoit Les Demoiselles d’Avignon, un tableau qui constitue un évènement capital dans les débuts du cubisme. Gertrude Stein le présente à Matisse, pendant l’hiver 1906.

Le Portrait de Gertrude Stein (New York, Metropolitan Museum of Art32), commencé en hiver, est enfin achevé grâce à une peinture de Cézanne, Madame Cézanne à l’éventail, que Gertrude Stein avait acquise au salon d’automne en 1904.

Influences africaines

De 1907 à 1909, Picasso est sous influence de l’art africain, notamment de l’art congolais. Cette période est marquée au début par les deux figures du côté droit des Demoiselles d’Avignon qui ont été en partie inspirées par les masques africains que Picasso possédait.

Cubisme

De 1907 à 1914, il réalise avec Georges Braque des peintures qui seront appelées « cubistes ». Elles sont caractérisées par une recherche sur la géométrie et les formes représentées : tous les objets se retrouvent divisés et réduits en formes géométriques simples, souvent des carrés. Cela signifie en fait qu’un objet n’est pas représenté tel qu’il apparaît visiblement, mais par des codes correspondant à sa réalité connue. Le cubisme consiste aussi à représenter sur une toile en deux dimensions un objet de l’espace. Picasso décompose l’image en multiples facettes (ou cubes, d’où le nom de cubisme) et détruit les formes du réel pour plonger dans des figures parfois étranges (comme une figure représentée sur une moitié de face, et sur l’autre de côté). Cette technique, initiée par Picasso, Braque et, dans une certaine mesure, Herbin, fit de nombreux émules tels que Juan Gris, Francis Picabia, Brancusi, les Delaunay, Albert Gleizes.

La réalisation des Demoiselles d’Avignon, l’œuvre fondatrice du cubisme commencée pendant l’hiver 1906-1907 et achevée début juillet 1907, et surtout les portraits — notamment de Daniel-Henry Kahnweiler et Ambroise Vollard — des années 1910 ont été influencés notamment par les travaux des mathématiciens Henri Poincaré et Esprit Jouffret dont les idées — et les schémas — furent vulgarisés à Picasso et à son entourage montmartrais, par leur ami Maurice Princet. Dès lors, peindre l’espace et le temps consiste à représenter sur une toile en deux dimensions un objet de l’espace.

Au début de l’été, Daniel-Henry Kahnweiler fait une première visite au Bateau-Lavoir. En octobre, a lieu une rétrospective Cézanne au Salon d’automne. Pendant l’hiver 1908, Picasso peint L’Amitié (Leningrad, Ermitage), Nu debout (Boston, Fine Arts Museum). Il séjourne à La Rue-des-Bois, village à 60 km au nord de Paris, durant l’été et en octobre, il propose la version définitive des Trois femmes (Leningrad, Ermitage).

En mai 1909, Picasso se rend à Barcelone et à Horta de Ebro avec Fernande Olivier. Là, il peint les Paysages (New York, MoMA). À Paris, en septembre, il déménage au 11, boulevard de Clichy, et réalise des sculptures : Tête de Fernande (Paris, Musée Picasso). En 1910, il fait les portraits d’Ambroise Vollard (Moscou, Musée Pouchkine), de Wilhem Uhde (Saint-Louis, collection Pulitzer) et de Daniel-Henry Kahnweiler (Chicago, Institut d’art). Picasso part pour Céret, village de Catalogne française, dans les Pyrénées-Orientales, en juillet 1911. Fernande Olivier et Braque le rejoignent en août. Le 5 septembre, il rentre à Paris. Picasso est absent de la salle cubiste au Salon d’automne qui commence le 1er octobre.

À l’automne, Eva Gouel — qu’il appelle « Ma jolie » dans plusieurs de ses toiles — entre dans sa vie.

Les premiers collages et les premiers assemblages sont réalisés pendant l’hiver 1912, Nature morte à la chaise cannée (Paris, Musée Picasso), Guitare(s) en carton (Paris, Musée Picasso). Le 18 mai, il part de Céret pour Avignon et le 25 juin s’installe à Sorgues. Il déménage 242, boulevard Raspail. Picasso et Daniel-Henry Kahnweiler signent le 18 décembre une lettre-contrat. Vers le 10 mars 1913, il retourne avec Eva Gouel, souffrante, à Céret où ils séjournent tout l’été. Le Verre d’absinthe est peint au printemps 1914. Après le départ pour Avignon, en juin, il fait un retour au portrait, en juillet. Eva meurt le 14 décembre 1915.

Trois formes de cubisme émergent : le précubisme, ou cubisme cézannien, le cubisme analytique et le cubisme synthétique.

Les Ballets russes

Pendant la Première Guerre mondiale, Picasso échappe à la mobilisation du fait de sa nationalité, l’Espagne ne comptant pas parmi les belligérants. Il séjourne à Rome avec Jean Cocteau, à partir du 17 février 1916. Il s’installe Via Margutta, d’où il voit la villa Médicis. Outre de nombreux portraits dessinés, il peint L’Italienne, L’Arlequin et Femme au collier.

En mai, Cocteau présente Diaghilev à Picasso. Il travaille comme décorateur pour le ballet Parade de Léonide Massine et les Ballets russes de Serge de Diaghilev, sur une musique d’Erik Satie. Il rencontre Igor Stravinsky et la danseuse Olga Khokhlova, qui devient sa femme. Dans une veine décorative, Picasso réalisa plusieurs portraits d’elle et de leur fils (Paul en Pierrot en 1925).

Fin mars 1917, il voyage à Naples et à Pompéi et revient à Paris, fin avril. Le 18 mai, la première de Parade a lieu au Châtelet. Puis en juin, Picasso part pour Madrid avec la troupe de Diaghilev et Olga, et le 12 juillet, un banquet est offert en son honneur à Barcelone.

Du 23 janvier au 15 février 1918, Picasso expose avec Matisse chez Paul Guillaume. Il se marie avec Olga à l’église russe de Paris, le 12 juillet. Cocteau, Max Jacob et Apollinaire sont les témoins. Pendant un séjour à Biarritz, il peint Les Baigneuses (Paris, musée Picasso).

En mai 1919, Picasso part pour Londres travailler au ballet, Le Tricorne, sur une musique de Manuel de Falla. Pendant l’été, il séjourne à Biarritz chez Mme Errazuriz puis s’installe avec Olga à Saint-Raphaël (Côte d’Azur).

Son fils Paulo naît le 4 février 1921. Durant l’été, il s’installe avec Olga et Paulo à Fontainebleau. Il y peint les Femmes à la fontaine (Paris, musée Picasso et New York, Museum of Modern Art) et Les Trois Musiciens (New York, Museum of Modern Art et Philadelphie Museum of Art). Cette même année, le musée de Grenoble obtient du peintre le premier tableau pour exposition dans une collection publique française (Femme lisant), représentant sa femme Olga Khokhlova.

En juin 1922, lors d’un séjour à Dinard sur la côte nord de la Bretagne, il peint Deux femmes courant sur la plage (La Course, Paris, Musée Picasso). Puis, en décembre, il réalise le décor pour L‘Antigone de Cocteau, créée par Charles Dullin au théâtre de l’Atelier.

En 1923, il fait un nouveau séjour estival sur la Côte d’Azur, au cap d’Antibes, et peint La Flûte de Pan (Paris, Musée Picasso). Pendant l’été 1924, il séjourne à la villa La Vigie à Juan-les-Pins (Côte d’Azur), il fait son Carnet de dessins abstraits et peint Paul en arlequin (Paris, musée Picasso).

Pendant cette période des années 1920, dans un climat de reconnaissance mondaine, il fait dans ses tableaux un retour à la figuration et au classicisme : Trois femmes à la fontaine (1921), et certaines œuvres comme les Flûtes de Pan (1923), s’inspirent de la mythologie .

Surréalisme

L’année 1925 est celle d’une rupture radicale dans la production du peintre avec des tableaux très violents montrant des créatures difformes, convulsives, prises dans les rets d’une rage hystérique : Femme dans un fauteuil (1926) et Baigneuse assise (1930). L’influence des poètes surréalistes est indéniable dans cette volonté de dépeindre de l’intérieur l’enfer personnel. Cependant il adopte une approche plus pragmatique que celle du « rêve calqué sur la toile » des surréalistes.

En juin-juillet 1925, il achève La Danse et peint Le Baiser. Le 14 novembre, il participe à la première exposition surréaliste de la Galerie Pierre. En 1926, il peint Buste de jeune fille, L’Atelier de la modiste, Le Peintre et son modèle, qui marquent sa rencontre avec Marie-Thérèse Walter au début de cette année, alors qu’elle est encore mineure. Il réalise les Guitare(s) à clous. Le 19 octobre de cette même année, il visite le musée des Beaux-Arts de Grenoble, premier musée d’art moderne en France et pour lequel il avait fait don cinq ans auparavant du tableau Femme lisant.

Picasso a besoin alors d’une aide technique, notamment pour la réalisation des maquettes du Monument pour Guillaume Apollinaire dont il a reçu commande en 1922. Quelques années auparavant il avait renoué son amitié avec le ferronnier et sculpteur catalan, Julio González, rencontré à Barcelone du temps d’Els Quatre Gats, et vivant comme lui à Paris depuis 1900. Picasso s’adresse naturellement à lui, et ils entameront, de l’automne 1928 jusqu’en juillet 1932, une fructueuse collaboration technique autour des sculptures en fer forgé et soudé. C’est au printemps 1929 qu’il sculpte en fer soudé La Femme au jardin dans l’atelier de González, qui par la suite réalisera le bronze en 1932. C’est l’année aussi de ses dernières vacances à Dinard. Il peint le Grand nu au fauteuil rouge, et en février 1930, Crucifixion. À l’automne 1930, Marie-Thérèse déménage au 44 rue de la Boétie. Il achète le château de Boisgeloup, près de Gisors, à 80 km au nord-ouest de Paris, en juin, et s’y installe jusqu’à la fin de 1932.

Deux figures au bord de la mer est peint en janvier 1931, et en mars, Nature morte sur un guéridon. Cette année-là, deux livres majeurs : Les Métamorphoses d’Ovide (Lausanne, Skira) et Le Chef-d’œuvre inconnu de Balzac (Paris, Ambroise Vollard) sont édités.

En 1932, la Jeune fille devant le miroir est finie. Une rétrospective à la galerie Georges Petit, puis au Kunsthaus de Zurich, a lieu en juin. Picasso travaille à Boisgeloup aux têtes sculptées d’après Marie-Thérèse, et à la série de dessins d’après La Crucifixion de Matthias Grünewald.

En 1933, l’éditeur Albert Skira demande à Picasso d’illustrer un Minotaure pour la couverture du premier numéro de sa nouvelle revue du même nom. Bien que Picasso ait déjà illustré ce personnage mythique une fois en 1928, c’est à partir de cette commission de 1933 que se déclenche en lui une véritable obsession de la symbolique du Minotaure, avec notamment La Minotauromachie et la Suite Vollard.

Il passe les vacances de l’été 1933 à Cannes avec Olga et Paulo.

De juin à septembre 1934, il fait des séries de corridas, peintes, dessinées et gravées. En août, il voyage en Espagne avec Olga et Paulo, et se rend aux corridas de Burgos et de Madrid. Il visite le Musée d’art catalan de Barcelone. Il réalise une série de sculptures à texture moulée : Femme au feuillage et Femme à l’orange. Au printemps 1935, la galerie Pierre expose des papiers collés. Minotauromachie est gravée. Il se sépare d’Olga en juin, et le 5 septembre, naît Maya Picasso, sa fille avec Marie-Thérèse Walter.

Le 25 mars 1936 Picasso part secrètement avec Marie-Thérèse et Maya pour Juan-les-Pins. Il fait des gouaches et des dessins sur le thème du Minotaure. Cette même année, au début de la Guerre civile espagnole, il est nommé directeur du Musée du Prado à Madrid. Début août, Picasso part pour Mougins et Dora Maar l’y rejoint.

Guernica et pacifisme

À la suite du bombardement de Guernica, le 26 avril 1937 pendant la guerre civile espagnole, Picasso est horrifié par ce crime et se lance dans la création d’une de ses œuvres les plus célèbres : Guernica. Il dit : « Cette peinture n’est pas faite pour décorer les appartements. C’est un instrument de guerre, offensif et défensif contre l’ennemi. » Elle symbolise toute l’horreur de la guerre et la colère ressentie par Picasso à la mort de nombreuses victimes civiles, causée par le bombardement des avions nazis à la demande du général Franco. Guernica est exposé dans le Pavillon espagnol de l’Exposition internationale à Paris en 1937. Cette même année Picasso demande sa naturalisation, ce qui lui est refusé ; il ne redemandera plus jamais la nationalité française.

Dans la même période, il réalise également une sorte de bande dessinée, Songe et mensonge de Franco. Dix-huit gravures dans lesquelles il inclut des textes poétiques. Il les destine à être tirées en cartes postales et vendues au profit des républicains espagnols.

Une anecdote veut qu’à Otto Abetz, ambassadeur du régime nazi à Paris, qui lui aurait demandé, sur le ton de la colère, lors d’une visite à son atelier devant une photo de la toile de Guernica : « C’est vous qui avez fait cela ? », Picasso aurait répondu : « Non… c’est vous. » Dans une interview accordée à Simone Tery, publiée le 24 mars 1945, dans Les Lettres françaises, il revient sur l’anecdote en disant qu’elle est « à peu près vraie » et précise qu’en réalité il distribuait aux visiteurs allemands des années 1940 des photos reproduisant le tableau, en les narguant d’un « Emportez-les. Souvenirs, souvenirs ! ».

En octobre-décembre 1937, Picasso peint La femme qui pleure, puis, en 1938, fait un grand collage, Les Femmes à leur toilette. En juillet 1938, il va à Mougins avec Dora Maar. Début juillet 1939, toujours avec Dora, il part chez Man Ray à Antibes ; il y peint le tableau Pêche de nuit à Antibes. De septembre 1939 au début de 1940, il est à Royan, où il réalise notamment Séquence de femmes au chapeau.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, Pablo Picasso vit à Paris. Entre 1942 et 1943, il réalise l’assemblage, Tête de taureau, L’Aubade, L’Homme au mouton. Les archives sur le marchand d’art proche des nazis, Hildebrand Gurlitt, indiquent qu’il affirme avoir acheté une œuvre chez Picasso lui-même en 1942, éventuellement sous la contrainte.

L’immense notoriété de Picasso lui procure une relative protection, sans lui épargner les tracasseries. Il est fiché comme « anarchiste » par la Sûreté. Son ami Max Jacob sera arrêté par la Gestapo d’Orléans, le 24 février 1944 à Saint-Benoît-sur-Loire, puis meurt au camp de Drancy, malgré des interventions tardives pour le faire libérer, dont celles de Jean Cocteau. Ce dernier s’inquiète aussi pour Picasso, qui assiste publiquement à l’enterrement.

Entre-temps, Picasso rencontre Françoise Gilot en mai 1943, mais habite chez Marie-Thérèse Walter durant l’insurrection de Paris d’août 1944.

Engagement au Parti communiste

Après la Seconde Guerre mondiale, ses tableaux deviennent plus optimistes, plus gais, montrant, comme l’indique le titre d’un tableau de 1946, la Joie de vivre qu’il ressent alors. Picasso adhère, le 5 octobre 1944, au Parti communiste français (PCF) et publie un article dans L’Humanité, les 29 et 30 octobre 1944, intitulé « Pourquoi j’ai adhéré au Parti communiste », dans lequel il explique que son engagement personnel date de la période de la Guerre d’Espagne, renforcé par la lutte des résistants communistes français durant la guerre qui vient de s’achever, et qu’il ne lui suffit plus de lutter avec ses peintures « révolutionnaires » mais de « tout [lui]-même », adhérant à l’idéal communiste de progrès et de bonheur de l’homme. S’il se sent proche des idéaux du parti, il n’en sera jamais un membre actif, gardant sa totale liberté d’expression et prenant position principalement à travers ses tableaux, dénonçant notamment la Guerre de Corée en 1951 et prônant la Paix contre la Guerre dans de nombreuses œuvres. Picasso sera même en butte à de nombreux conflits avec les dirigeants du PCF, notamment quant à un portrait jugé peu respectueux de Joseph Staline, publié à la demande de Louis Aragon le 12 mars 1953 à la une des Lettres françaises. C’est l’Affaire du portrait de Staline, au cours de laquelle le PCF oblige Louis Aragon à faire son autocritique.

Très opposé à la guerre, Picasso peint la célèbre Colombe de la paix (1949) à l’occasion de son adhésion au Conseil Mondial de la Paix et reçoit à ce titre un prix international de la paix en 1955. L’attrait pour les colombes chez le peintre remonte à son enfance, où son père utilisait des pigeons comme modèles que Picasso allait jusqu’à emporter avec lui à l’école.

Période de Vallauris

Le 7 octobre 1944 s’ouvre le Salon d’Automne et la rétrospective Picasso. Le Charnier (New York, Museum of Modern Art) est peint en avril-mai 1945, d’après le souvenir de la découverte en décembre 1944, du corps supplicié de son ami, le jeune poète surréaliste Robert Rius. Picasso part avec Dora Maar pour le cap d’Antibes, en juillet, et, le 26 novembre, Françoise revient vivre chez Picasso.

En 1946, Picasso rejoint Françoise à Golfe-Juan, rend visite à Henri Matisse à Nice, puis en juillet, avec Françoise, part pour Ménerbes (Vaucluse). En août, il s’installe chez Louis Fort à Golfe-Juan, et débute le travail au château d’Antibes en octobre. Lorsqu’il visite Vallauris à l’été 1946, il se rend chez Georges et Suzanne Ramié et modèle trois pièces de céramique. Lorsqu’il revient l’année suivante, il retrouve ses pièces et débute alors une période intense de production de céramique qu’on estime à près de 4 500 pièces.

Le 15 mai 1947, naît son fils Claude. En juin, le peintre part pour Golfe-Juan. Il s’installe à Vallauris en 1948 avec Françoise Gilot. Le 25 août 1948, Picasso est au Congrès des Intellectuels pour la Paix à Wroclaw. Revenu à Vallauris à la mi-septembre, il peint les deux versions de La Cuisine (l’une est actuellement au Musée Picasso de Paris et l’autre au Museum of Modern Art de New York).

En février 1949, La Colombe est choisie par Aragon pour l’affiche du Congrès de la Paix qui ouvre à Paris, le 20 avril. Le 19 avril 1949 naît Paloma. Le 6 août 1950, Laurent Casanova inaugure L’Homme au mouton à Vallauris. Picasso exécute La Chèvre, La Femme à la poussette, La Petite Fille sautant à la corde. Le 15 janvier 1951, il peint Massacre en Corée.

En 1952, il dessine La Guerre et La Paix pour la décoration de la chapelle de Vallauris, qui deviendra le musée Picasso, il écrit une seconde pièce de théâtre : Les Quatre Petites Filles.

L’affaire du Portrait de Staline dans Les Lettres françaises se déroule en mars 1953. Françoise Gilot le quitte et part pour Paris avec les enfants.

Il fait les portraits de Sylvette David, en avril 1954. En juin, il rencontre Jacqueline Roque. C’est en décembre que débute la série des variations sur Les Femmes d’Alger, de Delacroix. Il s’installe en mai 1955 avec Jacqueline, à la villa La Californie, à Cannes. En juin a lieu une rétrospective au musée des arts décoratifs. Pendant l’été, il travaille avec Henri-Georges Clouzot pour le film, Le Mystère Picasso. Il découvre le gemmail et décide de réaliser Femme dans un fauteuil d’osier, ainsi qu’une cinquantaine d’œuvres qui seront présentées l’année suivante aux États-Unis, au Metropolitan Museum of Art et à l’Art Institute of Chicago…

En 1956, Les Baigneurs, les sculptures en bois (Stuttgart, Staatsgalerie) sont coulées en bronze. Il peint L’Atelier de la villa La Californie.

Le 17 août 1957, il commence le travail sur Les Ménines (Barcelone, Musée Picasso). Le 29 mars 1958 a lieu la présentation de la décoration pour l’Unesco : La Chute d’Icare. En septembre, Picasso achète le château de Vauvenargues, dans lequel il emménage l’année suivante, déclarant à Daniel-Henry Kahnweiler, son ami et marchand d’art, étonné : « J’ai acheté la Sainte-Victoire de Cézanne. Laquelle ? La vraie. »

Il peint La Baie de Cannes entre le 19 avril et le 9 juin 1958 depuis la villa La Californie, qu’il a achetée en 1955 dans le quartier du même nom, à Cannes, où il réside avec Jacqueline jusqu’en 1961. Les premiers dessins d’après Le Déjeuner sur l’herbe de Manet sont faits le 10 août 1959.

Il épouse Jacqueline à Vallauris, le 2 mars 1961, et en juin, s’installe au mas Notre-Dame-de-Vie de Mougins, à Mougins, près de Cannes. Il travaille sur les tôles découpées et peintes, La Chaise, La Femme aux bras écartés, La Femme à l’enfant, Les Footballeurs. En novembre 1962, il peint L’Enlèvement des Sabines, dont une version se trouve au Musée national d’art moderne de Paris.

En 1962, Serge Lifar, qui avait rencontré Picasso grâce aux ballets russes, le sollicite pour réaliser les décors du ballet Icare, qu’il s’apprête à remonter pour l’Opéra National de Paris. Bien que n’ayant pas travaillé pour le ballet depuis 1924, Picasso accepte le projet et fournit à l’Opéra une esquisse rappelant la Chute d’Icare réalisée pour le siège de l’UNESCO en 1985.

L’inauguration de la rétrospective au Grand Palais et au Petit Palais se déroule le 19 novembre 1966. Au printemps 1967, Picasso est expulsé de son atelier de la rue des Grands-Augustins. En janvier 1970, le musée Picasso de Barcelone reçoit la donation des œuvres conservées par sa famille. Une exposition se déroule au Palais des Papes d’Avignon de mai à octobre.

Dernières années

En avril 1971, la galerie Louise Leiris expose les 194 dessins réalisés entre le 15 décembre 1969 et le 12 janvier 1971. Nouvelle exposition à la galerie Louise Leiris, en janvier 1973, qui montre cette fois les 156 gravures, réalisées entre fin 1970 et mars 1972.

Picasso meurt le 8 avril 1973 d’une embolie pulmonaire. Il est enterré deux jours plus tard dans le parc du château de Vauvenargues dans les Bouches-du-Rhône, selon la décision de sa femme Jacqueline et de son fils Paulo, après que la mairie de Mougins a refusé l’inhumation sur sa commune, voyant en lui un « communiste milliardaire ». L’enterrement a lieu dans une ambiance familiale délétère, Marie-Thérèse Walter, sa fille Maya ou Paloma, ainsi que son fils Claude se voyant interdire l’accès au château. Selon le vœu de Picasso, la sculpture monumentale en bronze La Femme au vase est scellée sur sa tombe, dans le parc du château. Jacqueline Roque sera elle-même enterrée à ses côtés en 1986.

Une exposition de 201 toiles se tient au Palais des Papes d’Avignon. Prévue de mai à septembre 1973, elle est finalement prolongée, selon les vœux de Jacqueline Picasso, jusqu’au début de l’année 1976, date à laquelle une partie des tableaux exposés sont dérobés entraînant la fermeture définitive.

Source : Wikipédia

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