• Peintre et graveur non figuratif. Art informel
  • 1919 –
  • Français

Pierre Soulages

Pierre Soulages, né le 24 décembre 1919 à Rodez dans l’Aveyron, est un peintre et graveur français associé depuis la fin des années 1940 à l’art abstrait, particulièrement connu pour son usage des reflets de la couleur noire, qu’il appelle « noir-lumière » ou « outrenoir ». Il est l’un des principaux représentants de la peinture informelle.

Enfance et formation

Pierre Jean Louis Germain Soulages est né à Rodez, rue Combarel, en 1919, fils d’Amans Soulages, carrossier (il fabriquait des charrettes à cheval), et d’Aglaé Zoé Julie Corp.

Amans Soulages avait été marié une première fois avec Lucie Pélagie Galtier, qui meurt en 1902, quelques semaines après avoir donné naissance à leur premier fils Gaston Pierre Amans Soulages.

En 1926, Pierre Soulages perd son père malade (il meurt d’un cancer du pancréas) et est élevé par sa mère et sa sœur Antoinette, de quatorze ans son aînée. Dès son plus jeune âge, à Rodez, cet Aveyronnais est fasciné par les vieilles pierres, les matériaux patinés et érodés par le temps, l’artisanat de son pays du Rouergue et ses âpres paysages, particulièrement les Causses. Il a tout juste huit ans lorsqu’il répond à une amie de sa sœur aînée qui lui demande ce qu’il est en train de dessiner à l’encre sur une feuille blanche : un paysage de neige. « Ce que je voulais faire avec mon encre, dit-il, c’était rendre le blanc du papier encore plus blanc, plus lumineux, comme la neige. C’est du moins l’explication que j’en donne maintenantA 1. »

À douze ans, alors élève au lycée Foch, son professeur l’emmène, avec sa classe, visiter l’abbatiale Sainte-Foy de Conques, où se révèlent sa passion de l’art roman et le désir confus de devenir un artiste. Il reçoit aussi, par l’intermédiaire de publications, le choc émotionnel des peintures rupestres des grottes du Pech-Merle dans le Lot, de Font-de-Gaume en Dordogne, d’Altamira en Cantabrie (Espagne), puis de Lascaux en Dordogne (découverte en 1940). Il accompagne dans ses recherches un archéologue local et découvre lui-même au pied d’un dolmen des pointes de flèches et des tessons de poteries préhistoriques qui entrent au musée Fenaille de Rodez.

Débuts de la carrière de peintre

À partir de 1934, Pierre Soulages commence à peindre dans l’Aveyron, son pays natal, des paysages d’hiver, des arbres sans feuilles, noirs, se détachant sur des fonds clairs : « Ce qui m’intéressait était le tracé des branches, leur mouvement dans l’espace… ». Après l’obtention de son baccalauréat, en juin 1938, il part s’installer à Paris en septembre et s’inscrit à l’atelier privé du peintre et lithographe René Jaudon. À la demande de celui-ci, il se présente au concours d’entrée à l’école des beaux-arts. Il y est admis en avril 1939 mais est vite découragé par la médiocrité et le conformisme de l’enseignement qu’on y reçoit. Pendant ce bref séjour dans la capitale, il visite le musée du Louvre, le musée de l’Orangerie où il admire Les Nymphéas de Monet et voit, à la galerie Paul Rosenberg, des expositions de Cézanne et Picasso qui sont pour lui des révélations, l’incitant à regagner Rodez, pour se consacrer pleinement à la peinture.

Il est mobilisé en 1940 et envoyé à Bordeaux. Après l’Armistice en juin, il rejoint les chantiers de jeunesse à Nyons dans la Drôme. Le 13 février 1941, démobilisé, il s’installe en zone libre, à Montpellier, et fréquente assidûment le musée Fabre.

D’avril 1941 à juin 1942, il prépare le professorat de dessin à l’École des beaux-arts de Montpellier où il rencontre Colette Llaurens, qu’il épousera le 24 octobre de la même année à l’église Saint-Louis de Sète. Réfractaire au STO, il obtient de faux papiers et devient régisseur dans le vignoble du mas de la Valsière à Grabels. Il fait alors la connaissance de l’écrivain Joseph Delteil, qui croit en lui dès les premiers instants. Ce dernier lui dira : « Vous peignez avec du noir et du blanc, vous prenez la peinture par les cornes, c’est à dire par la magie ».

Au début de 1943, il rencontre également Sonia Delaunay qui l’initie à l’Art Abstrait.

En juin 1944, mobilisé à nouveau au moment de le Libération, il se rend à Toulouse où il se lie avec Vladimir Jankélévitch et son beau-frère Jean Cassou, qui deviendra l’un des premiers défenseurs de son œuvre. Démobilisé à la fin de cette même année, il retourne à la Valsière.

L’après-guerre

En mars 1946, Pierre Soulages s’installe dans la banlieue parisienne (à Courbevoie, au 3 rue Saint-Saëns) et se consacre désormais entièrement à la peinture. Il commence à produire des œuvres sur papier, utilisant le fusain ou le brou de noix, et de grandes toiles sombres, refusées au Salon d’automne de 1946. Il en expose trois au quatorzième Salon des Surindépendants (un salon sans jury) d’octobre à novembre 1947, où celles-ci d’une « impressionnante symphonie de sombres coloris » contrastent avec les autres toiles, colorées, qui sont présentées : « Avec l’âge que vous avez et avec ce que vous faites, vous n’allez pas tarder à avoir beaucoup d’ennemis », le prévient alors Picabia, (rencontré un peu plus tard à la Galerie René Drouin), qui qualifie néanmoins une de ses œuvres de « meilleure toile du Salon ». En décembre 1947, il trouve un atelier à Paris, au 11 bis rue Victor-Schœlcher, près de Montparnasse (il occupera plusieurs ateliers dans la capitale ainsi qu’à Sète à partir de 1961).

À partir de 1948, il expérimente la technique du goudron sur verre. Il participe à des expositions à Paris (troisième Salon des réalités nouvelles) et en Europe, notamment à « Grosse Ausstellung Französische abstrakte Malerei » (une de ses toiles est d’ailleurs utilisée pour l’affiche de l’exposition) organisée en novembre par le collectionneur Ottomar Domnick (de), dans plusieurs musées allemands, aux côtés des premiers maîtres de l’art abstrait comme Del Marle, Domela, Herbin, Kupka, Piaubert, etc.

En mai 1949, il obtient sa première exposition personnelle à la galerie Lydia Conti à Paris et participe pour la première fois au Salon de mai (il y participera jusqu’en 1957) ; il expose également à la galerie Otto Stangl de Munich, à l’occasion de la fondation du groupe Zen 49, ainsi qu’à la galerie Betty Parsons de New York, en compagnie de Hans Hartung et Gérard Schneider, pour l’exposition intitulée Painted in 1949, European and American Painters. La même année, le Musée de Grenoble acquiert une de ses œuvres, Peinture 146 x 97 cm, 1949, la première à entrer dans une collection publique.

De 1949 à 1952, Soulages réalise plusieurs décors de théâtre (notamment pour la pièce Héloïse et Abélard de Roger Vailland, créée au Théâtre des Mathurins et La Puissance et la Gloire d’après le roman de Graham Greene, au Théâtre de l’Athé­néec) ou de ballet (Abraham de Marcel Delannoy au Théâtre du Capitole de Toulouse et Quatre gestes pour un génie de Maurice Cazeneuve au Château d’Amboise, tous deux chorégraphiés par Janine Charrat) et exécute ses premières gravures à l’eau-forte à l’atelier Lacourière.

En 1950, il figure dans des expositions collectives à New York (galerie Sidney Janis pour l’exposition France-Amérique), Londres, São Paulo, Copenhague. D’autres expositions de groupe présentées à New York voyagent ensuite dans plusieurs musées américains, comme « Advancing French Art » (1951), « Younger European Painters » (Musée Guggenheim, 1953). Dès le début des années 1950, ses toiles commencent à entrer dans les plus grands musées du monde comme la Phillips Memorial Gallery à Washington, le Musée Guggenheim et le Museum of Modern Art de New York, la Tate Gallery de Londres, le Musée national d’Art moderne de Paris, le Musée d’Art moderne de Rio de Janeiro, etc.

Reconnaissance internationale

Conquête des États-Unis

En janvier 1954, le marchand d’art Samuel M. Kootz (en) contacte Soulages et organise dans sa galerie new-yorkaise sa première exposition personnelle aux États-Unis10. L’année suivante, le peintre participe à la première documenta à Cassel en Allemagne.

En décembre 1957, il transfert son atelier au 48 rue Galande, dans le quartier de la Sorbonne, où il reçoit de nombreux artistes et collectionneurs. Il se remet à la gravure (exposition personnelle de gouaches et gravures organisées par Heinz Berggruen à Paris) et part pour la première fois à New York, où il rencontre de nombreux peintres américains (William Baziotes, Adolph Gottlieb, Willem de Kooning, Franz Kline, Robert Motherwell ou encore Mark Rothko avec lequel il se lie d’amitié).

Premières rétrospectives

En 1960 ont lieu ses premières expositions rétrospectives dans la galerie de Hanovre (la Kestnergesellschaft), le musée de Essen (Musée Folkwang), en 1961 au Kunsthaus de Zurich et au Musée municipal de La Haye, en 1966 au Musée des Beaux-Arts de Houston. En 1963, il participe à la septième Biennale de São Paulo, l’un des trois principaux événements du circuit international de l’art. De nombreuses autres expositions suivent, notamment en 1968 au Musée d’art contemporain de Montréal ou celle qu’organise de manière itinérante en France André Parinaud, Trente créateurs, en 1975-1976 aux côtés de Pierre Alechinsky, Olivier Debré, Hans Hartung, François Heaulmé, Roberto Matta, Zoran Mušič et Édouard Pignon.

Lors des Jeux olympiques de Munich en 1972, Soulages est retenu parmi les « meilleurs artistes de l’époque » pour réaliser une affiche.

En février 1978, il fait partie des membres fondateurs du Comité des intellectuels pour l’Europe des libertés.

Expérience de l’Outrenoir

En janvier 1979, lors d’un travail sur un tableau, Soulages ajoute et retire du noir pendant des heures. Ne sachant plus quoi faire, il quitte l’atelier, désemparé. Lorsqu’il y revient deux heures plus tard : « Le noir avait tout envahi, à tel point que c’était comme s’il n’existait plus ». Cette expérience marque un tournant dans son travail. La première toile recouverte intégralement de noir est Peinture 162 x 127 cm, 14 avril 1979, conservée au Musée Fabre de Montpellier.

À l’automne de la même année, le Centre national d’art et de culture Georges-Pompidou organise Soulages, peintures récentes, qui expose ses premières peintures monopigmentaires, fondées sur la réflexion de la lumière sur les états de surface du noir, qu’il appellera en 1990 outrenoir : « au-delà du noir une lumière reflétée, transmutée par le noir. Outrenoir : noir qui cessant de l’être devient émetteur de clarté, de lumière secrète. Outrenoir : un autre champ mental que celui du simple noir ».

Consécration

En 1984, Soulages reçoit une commande publique pour la réalisation de deux tapisseries destinées à orner une salle du nouveau bâtiment du Ministère des Finances. Attelé au projet dès 1985 au sein de la manufacture de la Savonnerie, il livre deux cartons peints au brou de noix puis, l’année suivante, met au point avec les teinturiers les différents tons qu’il désire voir rendus. Les tapisseries Savonnerie I, 4m30X 10m75, 1985 et Savonnerie II, 4m30X 10m75, 1985 sont terminées et livrées en 1991.

En 1987, il se voit confier par le Ministère de la Culture, mené alors par Jack Lang, une commande exceptionnelle. Sept années de travail, en collaboration avec l’atelier du maître-verrier Jean-Dominique Fleury à Toulouse, lui sont nécessaires pour réaliser les 104 vitraux pour les 95 fenêtres et neuf meurtrières de l’abbatiale Sainte-Foy de Conques (en remplacement de ceux posés en 1952). De nombreuses recherches sur la matière ont lieu et aboutissent à la création d’un verre unique, blanc et translucide, composé de grains de verre aggloméré et de verre cristallisé, diffusant ainsi la lumière à l’intérieur de l’édifice, tout en occultant ce qui se passe à l’extérieur. Les nouveaux vitraux sont inaugurés le 26 juillet 1994 en présence du ministre de la Culture, Jacques Toubon.

En 2004, il abandonne l’usage de la peinture à l’huile pour celui exclusif de l’acrylique, riche de nouvelles possibilités quant à la réflexion de la lumière (effets de matière beaucoup plus importants et possibilité de contrastes mat/brillant).

90 ans au Centre Pompidou

À l’occasion de son 90e anniversaire, le Centre national d’art et de culture Georges-Pompidou présente en octobre 2009 la plus grande rétrospective jamais consacrée à un artiste vivant par le Centre depuis le début des années 1980, avec plus de 2 000 m2 d’exposition. Malgré trois semaines de fermeture en raison d’une grève du personnel, l’exposition reçoit 502 000 visiteurs, se classant en quatrième position des expositions les plus fréquentées de toute l’histoire du Centre Pompidou. Parallèlement, le Musée du Louvre expose la même année une peinture de l’artiste de 300 × 236 cm, datant du 9 juillet 2000, dans le Salon Carré de l’aile Denon.

100 ans au Louvre

À l’occasion de son 100e anniversaire, le Musée du Louvre présente du 11 décembre 2019 au 9 mars 2020 une rétrospective dans le Salon Carré de l’aile Denon avec des toiles empruntées notamment au MoMAde New York, la Tate Modern de Londres ou la National Gallery of Art de Washington ainsi que des œuvres récentes de l’artiste. Pour cet événement, il a créé en août et octobre 2019 trois nouvelles toiles, peintures verticales de grands formats pensées uniquement pour cette exposition et en fonction de l’espace qui leur était réservées. Le peintre devient ainsi, après Chagall et Picasso, le troisième artiste à connaître de son vivant l’hommage d’une rétrospective au Louvre.

Source : Wikipédia

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